Les Bréves . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Table actualités FRANCE-CORÉE ACTUALITÉS - Les News (3)

 

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RFI Chronique Asie 01/04/2003 - Corée du nord: à la recherche de Kim Jong Il

Maladie, ruse de guerre ou mesure de protection renforcée, les hypothèses en cours sur la mystérieuse disparition du dirigeant nord-coréen Kim Jong Il sont nombreuses. En effet, le «cher leader» n’est pas apparu en public depuis bientôt d! eux mois. La dernière fois que les médias officiels ont publié sa photo remonte au 12 février, lorsqu’il avait assisté à une réception organisée par l’ambassadeur russe en Corée du nord. Le 26 mars, l’absence du leader suprême du régime lors de l’ouverture de la session annuelle du Parlement à Pyongyang, a surpris. C’était la première fois depuis cinq ans que le fils aîné du fondateur de la République populaire de Corée ne se rendait pas à cette cérémonie. Selon des informations de source nord-coréenne, l’absence de Kim Jong Il n’est pas une disparition mais une ruse: il se cacherait par crainte d’une opération militaire. Le ministre japonais de la Défense a affirmé en effet qu’une frappe préventive contre la Corée du nord ne violerait pas la constitution pacifique du Japon. Ces déclarations ont renforcé la certitude des Nord-coréens qu’après l’Irak, George Bush n’hésitera pas à attaquer la Corée du nord.

En dépit des appels à la mobilisation populaire contre les Etats-Unis, un calme étrange règne dans la capitale nord-coréenne. Certes, les discours officiels sont toujours menaçants. Leur cible est aujourd’hui le Japon, accusé de relancer la course aux armements suite au lancement de deux satellites espions par Tokyo la semaine dernière.

Mais, contrariant les pronostics, le régime nord-coréen n’a pas profité de la guerre en Irak pour pousser ses pions. Il fait même preuve d’une certaine retenue depuis le début du conflit. Cette retenue s’explique par la crainte de perdre le soutien de la Chine, le dernier allié de la Corée du nord dans la région. Pékin a envoyé un message clair aux autorités nord-coréennes: il faut arrêter de jouer avec le feu. Les Chinois voient déjà les conséquences possibles de ce jeu: entre autres, la renaissance du militarisme japonais, qui profite de la tension nucléaire dans la péninsule pour relever la tête. Pour la Chine, le lancement de deux satellites espions pourrait être le premier pas vers un éventuel réarmement du Japon. Une éventualité perçue à Pékin comme inacceptable, en raison des souvenirs des dégâts provoqués par l’impérialisme japonais en Asie pendant la deuxième guerre mondiale. Any BOURRIER - RFI

 

Spécial RKI 28/03/2003 - Comment l'économie coréenne affronte la guerre en Irak

Alors que le conflit irakien est entré dans sa deuxième semaine, les chances pour que la guerre soit courte semblent de plus en plus s'éloigner. C'est une mauvaise nouvelle à bien des égards, et les marchés financiers ont commencé à perdre l'optimisme qui était le leur aux premières heures de l'offensive américano-britannique. En Corée, on est donc bien obligé d'admettre qu'il faudra plusieurs mois durant faire tourner la machine économique avec un brut hors de prix. Le pays étant gros importateur d'hydrocarbures, les effets de la hausse du prix du baril se sont déjà fait sentir. Ainsi, la Banque de Corée a révélé hier que la balance des paiements, en février, avait été déficitaire pour le troisième mois consécutif, le creux de 20,5 millions d'euros étant largement dû au prix des importations de brut.

Mais les exportations coréennes, puissant moteur de la croissance depuis un an, fléchissent elles aussi. D'après le ministère du Commerce et de l'Industrie, la guerre a déjà entraîné l'échec de 435 livraisons, soit un manque à gagner de plus de 54 millions d'euros.

Autre moteur de croissance qui se grippe, la consommation intérieure, un phénomène qui avait déjà commencé avant le début du conflit. Principales raisons, la perte de confiance des ménages du fait de la crise nord-coréenne, et un grave problème de surendettement. Cette morosité risque encore de s'aggraver quand les entreprises répercuteront la hausse du prix du pétrole sur les prix de détail. Et ce d'autant plus que, faisant le gros dos pour se préparer à une guerre longue, nombre de grands groupes ont annoncé des restructurations, ce qui risque d'augmenter le nombre de chômeurs dans le pays.

Inévitablement, les grands projets d'investissements vont aussi pâtir de cette frilosité et on ne pourra compter sur eux pour tirer l'économie. C'est ce qui ressort en tout cas d'une enquête menée récemment auprès des dirigeants de 65 grandes boîtes du pays, qui se montrent tous pessimistes et qui, à 59 %, prévoient de suspendre ou d'annuler des investissements projetés.

Vu sous cet angle, on imagine mal l'économie sud-coréenne réaliser 5 à 6 % de croissance cette année comme le gouvernement continue à l'affirmer. Le chiffre de 3 % semble désormais raisonnable à la plupart des observateurs.

Il y a pourtant, heureusement, de bonnes raisons d'espérer un meilleur résultat. Dans un récent rapport, la Féderation des Industries coréennes a ainsi fait remarquer que, si elle ne s'éternisait pas, la guerre en Irak pourrait bénéficier à de nombreux secteurs exportateurs du pays. La confiance qui pourrait accompagner un retour à la paix relancerait le marché de l'électronique, de l'automobile et des semi-conducteurs. La baisse du prix des hydrocarbures, évidemment, donnerait un coup de fouet à la pétrochimie. Enfin, les entreprises de BTP et les exportateurs de hi-fi, d'ordinateurs, d'électroménager et de véhicules pourraient raffler la mise sur les marchés du Moyen-Orient. Ce n'est pas une vue de l'esprit : en 1991, huit mois après la première guerre du Golfe, les exportations coréennes dans la région avaient presque doublé. Dans ce scénario, plus que le marché intérieur, qui mettrait un certain temps à solder ses dettes et à retrouver la confiance, ce serait les ventes à l'extérieur qui relanceraient l'économie du pays.

Mais attention, il ne s'agit là que de prospective. Les économistes le rappellent : un conflit trop prolongé en Irak, de nouvelles agressions anti-américaines type 11 septembre, et un pourrissement de la crise nucléaire nord-coréenne, suffiraient à empêcher la conjoncture de retrouver le sourire.

Spécial RKI30314 - Le dialogue biaisé de Roh Moo-hyun et George Bush

Si d'après la Maison Bleue l'entretien téléphonique qu'ont eu hier soir Roh Moo-hyun et George Bush n'a duré que 15 mn, les sujets de discussion n'ont pas manqué. Premier point, le président américain a voulu s'assurer du soutien de son homologue sud-coréen dans sa campagne contre l'Irak. Un soutien qui s'était manifesté quelques heures plus tôt par l'annonce que 500 hommes du génie sud-coréen seraient envoyés sur place en cas d'offensive américaine. Deuxième point, la relation entre les deux alliés récemment mise à mal par le chantage nucléaire de Pyongyang. Sur ce plan, les deux chefs d'Etat ont multiplié les formules visant à montrer au monde qu'ils sont sur la même longueur d'onde : la crise doit être réglée de manière pacifique.

Le chef de la Maison Blanche a profité de l'occasion pour inviter formellement son homologue sud-coréen à Washington dans les semaines qui viennent, sommet qui sera préparé par une rencontre des ministres de la Défense des deux pays le 27 mars prochain.

Cette démonstration de solidarité tombe à pic pour les deux capitales. Manoeuvres militaires, incidents aériens et tirs de missiles sont en effet en train de transformer la crise nord-coréenne en une inquiétante escalade et il devenait urgent, avant de la redessiner, de réaffirmer l'alliance qui unit Séoul à Washington.

Pourtant, derrière cette entente de façade, les positions des deux présidents n'ont pas changé. Roh Moo-hyun exclut tout recours à la force ou à des sanctions économiques pour faire céder la Corée du Nord, tandis que George Bush affirme que de tels moyens de coercition pourront être employés en dernier ressort.

Le problème est que, derrière ces divergences de vue sur les moyens de résoudre la crise, Américains et sud-Coréens n'ont pas les mêmes agendas. A Séoul, on ne cesse en effet d'appeler les Etats-Unis à ouvrir un dialogue avec la Corée du Nord. Par solidarité intercoréenne, peut-être. Egalement parce qu'en cas de conflit la Corée du Sud subirait les plus gros dommages. Mais aussi, on commence à s'en rendre compte, parce que, à mesure que la tension monte, la puissance économique sud-coréenne vacille. Consommateurs et investisseurs perdent confiance et, depuis une semaine, les marchés financiers de Séoul ne cessent de chuter.

Dans ces conditions, on peut se demander ce qui motive les Américains dans leur refus de parler directement avec les nord-Coréens. Aux Etats-Unis y compris, de plus en plus de voix s'élèvent pour avertir George Bush : il faut cesser de jouer la montre, disent-elles, ou bien nous serons bientôt obligés de négocier avec une nouvelle puissance nucléaire. Et certains ont beau jeu de stygmatiser le caractère borné du président américain, comme si cela pouvait suffire à expliquer l'aggravation de la crise coréenne.

Sauf que, plutôt que de sous-estimer l'administration américaine, il faut peut-être retourner les perspectives si l'on veut comprendre ce qui se joue en ce moment. Le point de départ est d'accepter que les informations qu'ont laissé filtrer les services de renseignement américains ne relèvent pas de l'intoxication. La Corée du Nord posséderait déjà une petite force de dissuasion, ou en tout cas les matières fissiles permettant de fabriquer un ou deux engins nucléaires. Dans ces conditons, la laisser en produire deux ou trois de plus ne change pas fondamentalement les données du problème. Pour les Etats-Unis, un recours à la force ferait courir trop de risques aux alliés sud-coréens et japonais : les menaces de frappe préventive seraient donc essentiellement réthoriques. Aucune urgence non plus à accepter des négociations, surtout dans un cadre bilatéral qui serait défavorable à Washington.

Conclusion : si l'administration Bush laisse pourrir la crise, c'est tout simplement qu'elle y a intérêt. En face, le régime de Kim Jong-il peut toujours multiplier les provocations : elles sont autant de preuves de son impuissance. D'autant que la poursuite de programmes d'armements conventionnels et nucléaires pèse sur une économie nord-coréenne déjà moribonde.

On le voit : ce n'est pas la Corée du Nord qui pousse les Etats-Unis dans ses derniers retranchements, mais bien le contraire. Une stratégie qui peut-être s'inspire de celle d'un autre président américain aux manières de cow-boy, Ronald Reagan. Il faut se le rappeler : c'est en provoquant l'URSS dans une course aux armements dont elle n'avait plus les moyens que Washington précipita son effondrement à la fin des années 80.

Gros problème de cette stratégie : c'est actuellement la Corée du Sud qui, dans son économie, en paye les pots cassés.

Chronique Asie - RFI14/03/2003 : Le coût de la guerre en Irak pour les pays asiatiques

Presque tous les pays asiatiques voient avec inquiétude se profiler la menace d’une guerre en Irak. Car ils sont fortement dépendants de leurs importations en pétrole, Indonésie et Malaisie exceptés. La région dépend à 50% du Moyen Orient pour ses importations contre seulement 25% pour les Etats Unis. Cette dépendance énergétique n’a pas empêché plusieurs pays de se rallier aux Etats Unis, leur principal débouché commercial. Ils se préparent néanmoins au pire : les Philippines veulent constituer un mois de réserves de brut, la Corée du Sud puisera dans ses stocks si le prix du baril reste élevé, l’Inde incite ses raffineurs à augmenter! leurs réserves afin qu’ils puissent satisfaire la demande et faire tourner les usines pendant un mois, la Chine a lancé ses compagnies pétrolières à l’assaut du monde. Aucun de ces pays, à l’exception du Japon et de la Corée du Sud, n’a de réserves stratégiques parce qu’elles sont trop coûteuses.

La pénurie ou les prix trop élevés du pétrole vont également augmenter l’inflation, diminuer les investissements étrangers et provoquer la chute du tourisme. Les autorités de certains pays occidentaux ont en effet conseillé leurs ressortissants de ne pas se rendre en Indonésie, en Malaisie, en Thaïlande et aux Philippines en raison des risques d’attentats. Il est vrai qu’une guerre en Irak rendrait encore plus difficile la vie des touristes dans les pays à majorité musulmane comme la Malaisie et l’Indonésie.

Mais le plus grand préjudice sera la chute des exportations vers les Etats Unis. Ce pays est le principal partenaire commercial des tigres asiatiques et achète 40% des produits exportés par la région.

Paradoxalement, certains vont tirer profit de la guerre. C’est le cas, par exemple, du Vietnam. Hanoi espère multiplier ses exportations de pétrole à des prix élevés grâce à la pénurie qui pourrait suivre le déclenchement des hostilités. Le gouvernement table également sur une augmentation du tourisme, le Vietnam étant l’une des destinations les plus sures du monde. En revanche, les Philippines ont tout à perdre : baisse du tourisme, chute de ses exportations vers les Etats Unis et surtout, le risque de voir revenir du Moyen Orient un million de travailleurs immigrés philippins. Si la guerre éclate, Manille aura à gérer une double crise, humanitaire et financière : d’une part, l’arrivée de ces réfugiés et, d’autre part, une perte sèche de quelques dizaines de millions de dollars. Car les salaires des immigrés, jusque là envoyés régulièrement aux Philippines, ne viendront plus renflouer les finances de l’état. Any BOURRIER - ©RFI 14/3/2003

 

Spécial - RKI30310 - L'impact des risques géopolitiques sur l'économie de la Corée du Sud :

Depuis plusieurs mois déjà, la question irakienne mine la croissance de l'économie mondiale. Par un système d'emboîtement dont elle se passerait bien, la Corée du Sud souffre en plus des incertitudes que fait peser la question nucléaire nord-coréenne. Vendredi, la Banque de Corée indiquait ainsi que la croissance pour 2003, qu'on avait estimé à 6,2 puis à 5,5 %, pourrait tomber à 4 % si la conjoncture internationale continuait à se dégrader. La bourse de Séoul se montre d'ailleurs pessimiste : la semaine dernière, elle a enregistré 4 jours de baisse consécutifs, l'indice KOSPI se retrouvant à son plus bas niveau depuis novembre 2001. Autres symptômes alarmants, le ralentissement de la consommation des ménages, la dépréciation du won, la baisse des investissements et, ce qui aggrave cette baisse, une plus grande difficulté pour les banques et les entreprises coréennes à emprunter à l'étranger du fait de la hausse des primes de risque.

Du coup, les économistes agitent le spectre de la stagflation. Ce mot barbare désigne un cocktail déprimant de stagnation économique et d'inflation.

Stagnation au cas où le ralentissement actuel se confirmait. Inflation car ce qui en ce moment touche le plus durement la Corée est la hausse du prix du pétrole brut du fait des perspectives de guerre dans le golfe, hausse qui se répercute sur l'indice des prix du pays. C'est là le premier effet objectif de cette crise. Le deuxième est le retrécissement du marché au niveau planétaire. Fatalement, les exportations coréennes s'en ressentent un peu, notamment dans les secteurs de l'automobile, des ordinateurs et des puces de mémoire.

En opposition à ces risques objectifs, la crise nucléaire nord-coréenne n'a au bout du compte que des effets psychologiques. C'est l'anticipation d'une catastrophe dont on se doute pourtant qu'elle sera évitée, et non la catastrophe elle-même, qui atteint l'économie coréenne. La chute de la bourse ? Un problème de confiance. La baisse des investissements ? Encore un problème de confiance. L'essoufflement de la consommation ? Encore et toujours un problème de confiance.

L'économie sud-coréenne n'en mérite pas tant. Bien sûr, elle a quelques faiblesses, notamment le surendettement des ménages. Mais, il faut le rappeler, ses fondamentaux sont bons. Depuis la crise de 1997, les gouvernements successifs ont su faire le ménage, amorçant les dérégulations et les privatisations nécessaires, et entamant la difficile tâche consistant à restructurer les grands conglomérats. Mieux, les réserves en devises étrangères du pays ont été multipliées par cinq sur cette période : elles ont atteint près de 124 milliards de dollars à la fin du mois de février, la Corée du Sud se retrouvant ainsi au quatrième rang mondial dans ce domaine. Quant au budget de l'Etat, il reste largement excédentaire, ce qui offre au nouveau gouvernement de Roh Moo-hyun une large marge de manoeuvre pour relancer l'activité et la consommation. Des mesures en ce sens sont d'ailleurs attendues dans les prochaines semaines.

Enfin, les deux moteurs de croissance de l'année dernière ne sont pas complètement étouffés cette année. Grâce à un taux de chômage ramené à 3 %, la consommation des ménages n'a pas encore chuté trop bas. Quant aux exportations, les prédictions sont bonnes, notamment grâce au marché chinois. D'après la KOTRA, l'Agence coréenne de promotion du commerce et des investissements, la demande mondiale de produits coréens pourrait ce mois-ci croître de 7 à 10 % par rapport à mars de l'an dernier. Une bonne raison de reprendre confiance en l'économie coréenne.

 

¤ Spécial- RKI30303 - Comment Roh Moo-hyun veut réparer le moteur de la croissance

20/2/2003 - En appelant de ses voeux une ère de paix et de prospérité sur toute la péninsule et plus largement sur la région, Roh Moo-hyun montre bien l'importance qu'il attache à l'économie. Par ses ambitions, par sa richesse si ce n'est sa précision, son programme sur ce point requiert une attention toute particulière.

Aspect le plus visible, une vision qui est de faire de l'Asie du Nord-est une vaste zone de stabilité et d'intégration économique en prenant l'Union européenne comme référence ultime. Le nouveau chef de l'Etat sud-coréen a fait remarquer avec raison que l'économie de la région, en incluant la Chine et le Japon, représentait 1/5e de l'économie mondiale. Ajoutée à celle de la Corée, la population de ces deux pays est, de plus, quatre fois supérieure à celle des Quinze. Ce rêve intégrateur passe pourtant sous silence une tendance lourde: la dangereuse concurrence du voisin chinois, géant économique qui pompe 70 % des investissements en Asie et, d'après certains experts, pourrait d'ici quatre ans rattraper la Corée en termes de compétitivité technologique.

Une perspective qu'on peut modérer en ajoutant que, pour les industriels coréens, le Chine représente un marché de plus en plus florissant. Il n'empêche : maintenir son pays en tête du derby est un des principaux défis posés à Roh Moo-hyun.

L'autre défi est plus immédiat. Urgent, même, puisqu'il s'agit de relancer une croissance qui s'essouffle. Si le pays s'est sorti de la crise de 1997 de manière exemplaire, et s'il a encore enregistré l'an dernier une croissance de 6,1 %, les perspectives pour 2003 sont plus moroses. En janvier, le ministère de l'Economie et des Finances prévoyait une croissance de 5 à 5,9 %, un chiffre qui d'après le gouverneur de la Banque de Corée pourrait encore baisser si les prix du pétrole continuaient à flamber. Annoncé avant-hier, le déficit de la balance courante de décembre 2002, le premier en huit mois, donne d'ailleurs une indication en ce sens. D'autant que la menace de guerre en Irak ne pèse pas que sur le prix du brut : elle déprime aussi le marché américain, client important de la Corée. Séoul ne peut guère compter non plus sur le marché japonais, en stagnation depuis plusieurs années.

Après 1997, l'une des solutions avait été de développer la consommation intérieure, notamment en facilitant le crédit. Après avoir entraîné un endettement alarmant des ménages, ce moteur de croissance toussotte. En partie du fait de la menace renouvelée du nucléaire de Pyongyang, les consommateurs coréens redeviennent près de leurs sous.

Confronté à cette conjoncture inquiétante dès son entrée en fonction, l'équipe de Roh Moo-hyun a élaboré un projet dont on attend qu'il ait des effets à court comme à long terme. L'idée - faire de la Corée du Sud un hub économique de l'Asie du Nord-est - est longtemps restée assez floue. Ce n'est que récemmennt qu'ont été précisés les secteurs dans lesquels le pays devait s'imposer comme carrefour. Ils sont au nombre de trois : logistique, finance et industrie.

Sur le plan logistique, le projet a beaucoup d'atouts en sa faveur. Déjà parce que la Corée se situe géographiquement entre la seconde économie du monde, le Japon, et l'économie la plus dynamique, la Chine. Une position qui, a rappelé le nouveau président lors de son investiture, lui a valu bien des déboires dans le passé mais qui pourrait se transformer en une formidable opportunité. Ensuite parce que ce projet repose sur trois pôles de transports qui n'attendent que d'être renforcés : Incheon avec son nouvel aéroport international, et les ports de Busan et Gwangyang où pourront être développées des zones franches et des infrastructures plus étendues pour le transit des containers.

Ces pôles logistiques, conçus pour rééquilibrer un territoire national trop centré sur Séoul, devraient également bénéficier de la politique industrielle de Roh Moo-hyun. Priorité de cette dernière : encourager les nouvelles technologies. Une idée qui, sans être elle-même nouvelle, a la mérite de s'inscrire dans la logique d'une économie coréenne leader en matière de communications mobiles et de semiconducteurs. Pour passer à un nouveau stade, la priorité devrait être donnée aux structures de Recherches et Développement. Celles des PME, moteur essentiel de l'innovation, seront encouragées à se regrouper en une centaine de sites afin de faire jouer à fond les synergies. Quant à la recherche publique, elle pourrait voir son budget augmenter.

Le problème de cette ambition - devenir un carrefour logistique et high-tech - c'est qu'il est très gourmand en capitaux. D'où cette idée corollaire : imposer Séoul comme place financière régionale ; une place qui soit suffisamment attractive pour attirer les investissements étrangers. C'est là une nécessité car, après avoir atteint un pic en 1999, ces derniers n'ont cessé de baisser. L'équipe du président a donc conçu un train de mesures visant à faire de la Corée un pays réellement accueillant pour les investisseurs extérieurs, ce qu'elle n'a commencé à être que depuis 1997. Parmi ces mesures, la dérégulation et l'assainissement du marché, notamment en rendant les transactions financières plus transparentes, la baisse de diverses taxes telles que l'impôt sur le revenu des expatriés, ainsi que la privatisation d'entreprises publiques dont les banques commerciales.

Une politique très libérale, qui devrait équilibrer les mesures sociales type semaine de cinq jours envisagées en parallèle. La particularité coréenne c'est que, applaudies par l'OCDE et par bon nombre de chefs d'entreprises, ces réformes ne trouvent pourtant pas la faveur des milieux d'affaires les plus influents : ceux des conglomérats, Hyundai, Samsung ou SK, qui dominent tous les secteurs économiques du pays. Et pour cause : en ouvrant le marché à d'autres acteurs, la politique libérale de l'ancien président Kim Dae-jung, aujourd'hui reprise par Roh Moo-hyun, a fragilisé leur position d'oligopole. Les pratiques occultes de ces chaebols - comptes artificiellement gonflés, prêts croisés, évasion fiscale - sont en partie responsables de la crise de 1997. Depuis, les gouvernements s'attellent à restructurer ces mastodontes gérés par de grandes familles. Le ménage n'est pas encore achevé. Pour y parvenir, Roh Moo-hyun, poussé en cela par les associations civiques qui ont soutenu sa campagne, a prévu des mesures très précises telle que la limitation des participations croisées ou la taxation de tous types d'héritages pour éviter la transmission d'avoirs à l'intérieur des clans familiaux.

Les grandes visions passent souvent par des petites mesures de ce genre. C'est seulement ainsi que Roh Moo-hyun, on peut l'espérer pour la Corée, pourra donner chair à son grand projet de carrefour asiatique.

¤ RKI Spécial - Un vent de réformes sur la Maison Bleue

27 février 2003

Avec l'arrivée de Roh Moo-hyun, mardi, à la tête de l'Etat, c'est un vent de changement qui souffle sur la politique coréenne. Qu'ils s'en inquiètent ou s'en félicitent, tous les analystes sont d'accord sur ce point. Le changement, c'est déjà que le nouveau président n'est pas issu du sérail. A 56 ans, Roh Moo-hyun a eu en effet un parcours peu banal. Fils de paysans de la province de Gyeongsang, au sud-est du pays, il a occupé plusieurs emplois ouvriers avant de devenir avocat en suivant des cours du soir. Au cours des années 80, il s'est engagé d'abord dans la lutte pour les droits de l'homme puis dans l'action politique.

C'est ce destin original, tout autant que sa position d'outsider au sein de son propre camp, le Parti démocrate du Millénaire, qui lui a valu la faveur d'électeurs lassés par les pratiques autoritaires et corrompues de la vieille classe politique.

A la Maison Bleue, Roh Moo-hyun s'est en outre entouré d'un cabinet composé pour l'essentiel de têtes nouvelles. Beaucoup de ses conseillers sont de jeunes progressistes, pour certains d'origine modeste, qui comme lui ont pris part aux luttes pro-démocratiques des années 80. Cette équipe, qui comprend également quelques réformistes du Parti démocrate du Millénaire, s'est donné pour mission de réduire les fractions politiques, sociales et régionales du pays.

Une vaste ambition car, en dépit de sa volonté d'obtenir un consensus, Roh Moo-hyun ne rassemble pas tout le pays derrière son nom. Rappelez-vous son élection en décembre dernier : ce n'est que de 2,3 points qu'il avait devancé Lee Hoi-chang, son adversaire du Grand Parti National, un des écarts les plus étroits de l'histoire des scrutins présidentiels en Corée.

Les divisions du pays ne sont pas, tant s'en faut, exclusivement électorales. Première fracture que Roh Moo-hyun va tenter de réduire, celle qui oppose le nord et le sud de la péninsule. C'est par le dialogue, il ne cesse de le répéter, que le nouveau chef de l'Etat veut régler la crise nucléaire nord-coréenne. Avec un objectif à moyen terme : remplacer par un traité de paix l'armistice qui régit actuellement les relations entre les deux Corées.

La seconde fracture, c'est le territoire même de la Corée du Sud qu'elle divise. De longue date, le pays a été déchiré par des rivalités régionales qui recoupent les rivalités politiques. Solution proposée par la nouvelle équipe de Chong Wa Dae : redécouper les circonscriptions électorales afin que plusieurs parlementaires puissent y être élus. Le système actuel, à un seul élu par circonscription, provoquerait des polarisations trop radicales. Ce projet s'accompagne d'un plan de décentralisation et de déconcentration des pouvoirs, dont l'aspect le plus controversé est la création d'une nouvelle capitale administrative au centre du pays d'ici 2010.

La troisième série de divisions que la présidence Roh devra affronter est bien sûr d'ordre social. Le nouveau chef de l'Etat prévoit de faire passer une loi interdisant les discriminations et de mettre en place, comme c'est le cas aux Etats-Unis, des procédures de discrimination positive. Les travailleurs immigrés pourraient quant à eux bénéficier d'un permis de travail les sortant de leur actuel statut de " stagiaire ", statut dont abusent leurs employeurs. Sur le plan des lois du travail, le nouveau président est aussi favorable à la semaine de cinq jours : une réduction du temps de travail dont les milieux d'affaires disent qu'elle sera dommageable à la compétitivité du pays.

Le nouveau président espère pourtant des relations moins conflictuelles entre patronat et syndicats. Il compte réviser la législation afin de permettre aux syndicats, qui l'ont supporté pendant sa campagne, de former des partis politiques, leurs activités militantes ne devant cependant pas entraver la résolution des conflits dans les entreprises.

Homme d'origine modeste, Roh Moo-hyun se méfie des élites, et plus particulièrement des grandes familles qui dirigent les conglomérats du pays. D'où un vaste programme visant à réglementer leurs activités financières, souvent occultes, et à alourdir les taxes sur la transmission des richesses à l'intérieur de ces clans.

On ne s'étonnera donc pas que, bien qu'il martèle son intention de créer un environnement favorable à l'entreprise, le nouveau locataire de la Maison Bleue n'ait pas la faveur des milieux d'affaires. Sans compter l'opposition résolue des conservateurs du Grand Parti National, majoritaire à l'Assemblée Nationale, qui feront probablement tout pour bloquer ses réformes les plus controversées, semaine de cinq jours ou redécoupage des circonscriptions électorales.

Vue sous ce jour, l'insistance de Roh Moo-hyun à demander la "participation des citoyens" dans la mise en oeuvre de son projet de gouvernement se comprend beaucoup mieux. S'il veut privilégier la démocratie directe - il parle d'un référendum sur la création de la nouvelle capitale - c'est bien que le peuple a jusqu'à présent été son meilleur soutien. Y compris pendant sa campagne, puisque un fan club internet baptisé Nosamo, "ceux qui aiment Roh", a fait beaucoup pour soutenir sa candidature. Reste au nouvel élu à convaincre ses concitoyens que, sur le plan économique aussi, il peut donner un nouveau souffle au pays.

¤ RKI30212 Spécial - L'économie sud-coréenne sous l'emprise des agences de notation

12 février 2003

Tous les journaux ont mis à la une la baisse de l'appréciation de Moody's concernant la Corée du Sud. Depuis cette semaine, l'agence de notation américaine juge de manière négative le risque crédit de l'économie sud-coréenne. En effet, l'agence de notation internationale vient de dégrader de deux crans son évaluation pour le pays. Ainsi, pour les experts en " risque pays " de l'agence new-yorkaise, le crédit à long terme de la Corée du Sud est passé de positif à négatif. Les analystes de Moody's évoquent la situation incertaine dans la péninsule avec notamment la persistance de la crise autour des activités nucléaires de Pyongyang.

Première conséquence de cette révision, la monnaie coréenne, le won, a dévissé mettant fin à une longue période de progression face au dollar. A Séoul, le gouvernement a été pris au dépourvu par cette décision qui traduit de manière brutale et explicite le climat économique pesant de ces dernières semaines.

Cependant, la note à long terme attribuée à la Corée du Sud par Moody's reste inchangée à A3. Si le pays avait quitté le groupe des nations notées A, le peloton des meilleurs élèves de la finance internationale, l'humiliation aurait été encore plus grande.

Selon le directeur d'une institution financière sud-coréenne, cette note A est maintenue grâce aux actions de lobbying menée par le gouvernement auprès des agences de notations internationales.

Mais la menace d'une rétrogradation plane toujours. Moody's précise que l'environnement de la Corée du Sud et en particulier le risque d'escalade dans la tension avec Pyongyang ne permet pas d'envisager une hausse de cette note. En revanche, une révision à la baisse de ce A3 pourrait intervenir après la prochaine visite des auditeurs de Moody's en Corée du Sud. Une décision qui sera vivement ressentie en Corée à un moment où le pays est en passe de se débarrasser des séquelles de la crise financière de 97 qui l'avait relégué au fond du classement des agences de notation.

La crise nucléaire a maintenant des conséquences économiques claires. Dans un rapport précédent, Moody's s'était déjà inquiété des décisions brutales et imprévisibles de la Corée du Nord. Cette situation avait conduit Moody's à réduire ses pronostics de croissance pour le sud de la péninsule qui sont passés de 6,2% à 5%.

Bref, si le bras de fer se poursuit encore plusieurs semaines, il dure d'ailleurs depuis quatre mois, les investisseurs étrangers pourraient bouder la Corée du Sud et lui préférer des régions du monde plus clémentes. Ce scénario est le cauchemar des dirigeants sud-coréens qui cherchent par tous les moyens à attirer l'attention des grands argentiers de la planète pour faire du sud de la péninsule le carrefour économique et financier de l'Asie du Nord-est. Le gouvernement a donc les yeux rivés sur les notes attribuées par les trois grandes agences internationales, les deux Américaines Moody's, Standard and Poor's et la Française Fitch. Ces analystes font la pluie et le beau temps à Séoul. Le gouvernement retient son souffle à l'arrivée de chaque délégation d'audit de ces trois institutions. Leurs prévisions sont écoutées comme des oracles. Ces trois professionnels de l'analyse économique profitent du suivisme et de la myopie des investisseurs pour asseoir leur pouvoir et au passage faire oublier qu'ils se sont souvent trompés dans leurs pronostics.

L'hyper-sensibilité de la Corée aux jugements de la communauté internationale est à la fois le signe d'un sempiternel complexe coréen vis à vis de l'étranger mais aussi et surtout du statut particulier du pays dans la communauté économique. En effet, la Corée du Sud est à la fois le bon élève de la classe asiatique, capable de rembourser ses emprunts en un temps record, abonné à une croissance à deux chiffres mais aussi un pays mal connu donc inquiétant. La persistance de pratiques peu orthodoxes dans les entreprises et la longue complaisance de l'Etat à l'égard des chaebols, les conglomérats géants, ont toujours intrigué, voire effarouché les étrangers. La crise financière asiatique de 1997 avait d'ailleurs révélé l'envers du décor de la formidable réussite du petit dragon.

Aujourd'hui, les fondamentaux de la Corée sont plutôt bons. Le pays s'est doté de très solides réserves en devises étrangères pour pouvoir faire face à une nouvelle tempête financière. D'autres menaces planent aujourd'hui sur la croissance du pays, le surendettement des ménages, la dépendance énergétique, le spectre de l'inflation et celui d'un ralentissement de la consommation intérieure. La Corée du Sud ne peut pas résister à des chocs importants touchant l'un de ses domaines.

L'annonce d'une dégradation des estimations de Moody's est peut-être le signe d'une mauvaise santé du pays mais surtout cette annonce devrait avant tout être un catalyseur de problèmes. En effet, c'est le propre de l'économie, l'utilisation du thermomètre est souvent à l'origine d'une aggravation de la maladie.

 

¤ RKI30204 Spécial - Le Mont Geumgang, laboratoire des relations intercoréennes

4 février 2003 - Après plusieurs mois de négociations âpres, des semaines de travaux pour déminer le chemin et construire les routes, et une longue dispute entre la Corée du Nord et le commandement américain des Nations-Unies, les excursions au mont Geumgang par la route intercoréenne vont enfin commencer.

Mercredi, une mission d'inspection doit être effectuée sur le chemin qui mène à la montagne nord-coréenne et qui traverse la zone tampon, la fameuse zone démilitarisée, une région interdite et inviolée depuis 50 ans. Pour la première fois, demain, des civils vont pénétrer dans la DMZ et ressortir de l'autre côté, en territoire nord-coréen. Traverser la ligne de démarcation a été le privilège de quelques personnalités, des diplomates mais surtout des militaires, ce sera désormais à la portée de tous les touristes, sud-coréens ou d'un autre pays.

C'est donc un symbole important.

L'équipe de mercredi est composée de représentants du tour operator chargé des excursions et de membres du ministère de la Réunification. Ils vont examiner les conditions de séjour des touristes. Après le 14 février, des voyages expérimentaux doivent avoir lieu avant le lancement des opérations normales.

Depuis des mois, les deux voisins discutent des moyens de développer le tourisme sud-coréen au Mont Geumgang, un site réputé pour la beauté de ses paysages. Pyongyang a confié au groupe Hyundai-Asan le soin de développer les infrastructures hôtelières pour accueillir les touristes. En échange, les autorités de Séoul et l'entreprise doivent verser des droits d'exploitation, d'ailleurs très élevés, au régime communiste.

Les excursions ont commencé à la fin de l'année 1998 et ont connu un pic de popularité en 2000 avec 48 000 visiteurs environ. Mais le coût de ces séjours a dissuadé les sud-Coréens de se rendre dans cette montagne réputée magnifique alors que leur propre pays en compte déjà de nombreuses non moins magnifiques. Résultat, Hyundai-Asan a été au bord de la faillite et les activités au Mont Geumgang ont bien failli disparaître. Le projet a été sauvé in extremis par l'intervention du gouvernement qui a décidé de mettre la main à la poche pour subventionner les frais de séjour de certaines catégories de touristes comme, par exemple, les jeunes et les professeurs. Pour Séoul, les échanges avec le Nord sont une cause sacrée, un objectif politique prioritaire et il faut donc maintenir les contacts à tout prix. D'ailleurs les relations étroites entre la maison mère de Hyundai-Asan, Hyundai Merchant Marine et le gouvernement, sont en ce moment au coeur d'une violente polémique. Ironie de l'histoire, le président de l'entreprise et son numéro deux ont bien failli ne pas pouvoir participer au voyage inaugural au Mont Geumgang. Cette fois-ci, non pas en raison de la mauvaise volonté de Pyongyang mais de la justice de Séoul. En effet, ils étaient tous les deux sous le coup d'une interdiction de sortie du territoire dans le cadre de l'affaire du transfert de fonds de 200 millions de dollars environ versés à la Corée du Nord. Le Parquet sud-coréen a finalement décidé de lever provisoirement sa mesure de contrôle sur les cadres de Hyundai-Asan, ils pourront donc traverser la frontière intercoréenne.

L'ouverture d'une route doit donc donner un coup de fouet au programme touristique. Jusqu'à présent, pour se rendre dans le complexe touristique, il fallait prendre un bateau et la croisière durait quatre heures, avec la route intercoréenne le temps du voyage et aussi son coût devraient être largement réduits.

Mais depuis des semaines, l'ouverture des voies de communications qui traversent la DMZ a été retardée en raison d'un conflit persistant entre la Corée du Nord et l'ONU. En effet, depuis l'Armistice de 1953, les Nations- Unies contrôlent cette zone tampon et arbitrent le face-à-face coréen. Les routes et les futurs chemins de fer qui doivent traverser la zone démilitarisée seront donc sous administration de l'ONU, celle-ci entend appliquer ses contrôles aux personnes et aux marchandises qui emprunteront ses moyens de transports. Pour Pyongyang, il était impensable de se soumettre à ces contrôles. Le régime stalinien l'a dit et répété, il s'agit de projets intercoréens qui ne regardent pas les Nations- Unies. Il faut dire que ce sont les Américains qui ont le commandement de l'ONU en Corée du Sud, il est donc parfois difficile de faire la différence entre les représentants de la communauté internationale et ceux des Etats-Unis. Pourtant, il y a moins d'un mois la Corée du Nord a obtempéré après des semaines de bras de fer. Elle a accepté finalement les exigences de l'ONU. C'était le véritable feu vert à l'ouverture des routes.

Avec ce nouveau moyen d'accès au Mont Geumgang, Hyundai-Asan espère bien attirer des centaines de milliers de sud-Coréens, amateurs de marche en montagne mais aussi curieux de passer quelques jours dans le pays interdit. Bien sûr, ce séjour en Corée du Nord restera très encadré, pas question de sortir des frontières du site déclaré par le Parlement de Pyongyang " Zone Touristique Spéciale ", une sorte d'enclave isolée au milieu du pays communiste. D'ailleurs, à regarder la carte du pays, le Mont Geumgang n'est pas vraiment au coeur de la Corée du Nord mais seulement à 40 kilomètres de la frontière et près de la côte est de la péninsule. Bref, cette ouverture des routes n'est pas du tout une ouverture du pays, et encore moins du régime. Pour les autorités cette opération est avant tout commerciale destinée à renflouer les caisses de l'Etat. Les droits d'exploitation payés par l'entreprise sud-coréenne sont d'ailleurs exorbitants. Enfin, vu de Séoul, ce projet a son importance pour faire tomber les préjugés sur la Corée du Nord et rapprocher les populations des deux pays. Les excursions au Mont Geumgang font partie de la stratégie des tous petits pas menée par le gouvernement sud-coréen sous le label de la politique de la main tendue vers le Nord. En autorisant les échanges avec la Corée du Sud, le Nord pourrait être entraîné progressivement dans la spirale de l'ouverture. Si la population du Nord apprend à connaître celle du Sud et si elle réalise l'importance des performances économiques de son voisin capitaliste, il est possible que l'envie de changement dans le régime communiste se fasse plus forte avec une contagieuse envie de suivre le modèle sud-coréen.

 

¤ RKI30129 OMS : Un Coréen à la tête de l'OMS -

Lee Jong-wook a été élu mardi à la tête de l'Organisation Mondiale de la Santé. Ce médecin sud-coréen de 57 ans est un inconnu dans son pays mais un habitué des instances sanitaires internationales.

Il a d'ailleurs effectué l'essentiel de sa carrière à l'étranger. Diplômé de la prestigieuse université de Séoul et titulaire d'un master de santé publique de l'université de Hawaï, il s'est très top spécialisé dans les maladies infectieuses de l'Asie Pacifique. Son premier poste l'amène d'abord dans les îles Samoa puis dans les Fidji. A partir de 1981, il travaille dans un centre pour les maladies tropicales de cet archipel américain.

Il entre à l'Organisation Mondiale de la Santé deux ans plus tard, il est alors chargé de la lutte contre la lèpre dans la région Asie Pacifique. A partir des Philippines, il dirige plusieurs campagnes de lutte contre les épidémies qui touchent cette région. En particulier, à partir de 1990, il lance un programme de grande ampleur pour éradiquer la polio dans le Pacifique occidental. En quatre ans, le nombre de cas est presque divisé par dix dans cette région.

Après ce succès il est propulsé à la tête du programme mondial de vaccination de l'OMS et poursuit, à ce poste, son combat contre la Poliomyélite à l'échelle de la planète. Il sera à l'origine également de campagnes de vaccinations pour les enfants.

Il poursuit sa carrière au sein de l'agence onusienne, devient conseiller de la présidente puis directeur en 2000 du programme " halte à la tuberculose ". Ses premières mesures ont permis de distribuer des médicaments anti-tuberculeux dans le monde entier.

Le candidat sud-coréen s'est imposé face au directeur de l'agence Onusida, le Belge Peter Piot avec 17 bulletins, contre 15 à son adversaire. L'expérience de Lee Jong-wook au sein de l'OMS après 19 ans passés au service de l'agence genevoise et le soutien des pays asiatiques à sa candidature, même celui de la Corée du Nord, ont sans doute favorisé son élection. Le gouvernement sud-coréen a de son côté mené une campagne active de lobbying pour imposer son protégé. Le nouveau chef de l'OMS serait d'ailleurs un proche du futur président de la République Roh Moo-hyun.

Cette élection est un motif de satisfaction pour Séoul. Kim Dae-jung a aussitôt envoyé un message de félicitations à Lee Jong-wook qui est le premier Coréen à diriger une des institutions placées sous l'autorité des Nations-Unies. Il succède donc à Gro Harlem Brundtland une ex-premier ministre norvégienne qui doit quitter ses fonctions en juillet prochain.

Au cours de la campagne pour la présidence de l'OMS, Lee Jong-wook s'est montré sensible au combat contre la pauvreté dans le monde. Il devra aussi faire face à l'explosion de l'épidémie de Sida sur le continent africain. " L'Afrique est ma priorité ", a-t-il déclaré juste après l'annonce de son élection.

Lee Jong-wook veut également décentraliser l'action de l'OMS en donnant plus de moyens aux pays et aux régions concernés par les programmes sanitaires. Selon ses objectifs, 75% des ressources financières de l'agence onusienne devraient être allouées directement aux acteurs locaux et non pas utilisées par Genève. Il veut aussi contrôler l'efficacité des opérations et ne pas dilapider le budget annuel de plus de 900 millions d'euros sans un suivi des résultats sur le terrain.

A partir de cet été, Lee Jong-wook aura cinq ans pour faire ses preuves et réaliser les projets ambitieux qu'il s'est fixés. 29/01/2003 RKI Spécial.

 

¤ RKI30121 - Spécial : Que vont devenir les paysans coréens ?

L'Organisation mondiale du Commerce a entamé un nouveau cycle de négociations multilatérales depuis son sommet de Doha qui s'est tenu en novembre 2001 au Qatar. Une série de discussions s'ouvre le 22 janvier à Genève pour mettre en application les grands principes adoptés à Doha. A chaque nouveau round, depuis plus de 50 ans, le même exercice se répète, il s'agit d'obtenir l'abaissement des barrières tarifaires, avec toujours le même objectif, le développement des échanges commerciaux dans le monde.

La Corée du Sud va devoir défendre son agriculture au cours de ces pourparlers et négocier des clauses spéciales pour ne pas laminer avec trop de violence son secteur primaire encore sous perfusion. L'Organisation mondiale du Commerce a entamé un nouveau cycle de négociations multilatérales depuis son sommet de Doha qui s'est tenu en novembre 2001 au Qatar. Une série de discussions s'ouvre le 22 janvier à Genève pour mettre en application les grands principes adoptés à Doha.

A chaque nouveau round, depuis plus de 50 ans, le même exercice se répète, il s'agit d'obtenir l'abaissement des barrières tarifaires, avec toujours le même objectif, le développement des échanges commerciaux dans le monde.

La Corée du Sud va devoir défendre son agriculture au cours de ces pourparlers et négocier des clauses spéciales pour ne pas laminer avec trop de violence son secteur primaire encore sous perfusion.

Il faut dire que d'une manière générale, la Corée du Sud a bâti sa croissance économique fabuleuse à l'abri de solides protections tarifaires et aussi d'autres mesures plus détournées.

Mais depuis les années 90 et surtout depuis la crise financière de 1997, le pays a reconnu la nécessité de se mettre à l'école du libéralisme pour participer aux échanges mondiaux. La mutation est lente et difficile car elle remet en cause beaucoup de secteurs clé de l'économie sud-coréenne.

Le gouvernement sud-coréen prend donc des pincettes pour faire baisser ses droits de douane et il prend des gants de boxe pour se rendre à Genève où va se jouer un acte de la tragédie grecque de ses exploitants agricoles.

Signe de la difficulté des réformes de structure de l'économie du pays, la multitude des litiges. Le plus connu est celui des chantiers navals. Il oppose la Corée du Sud à l'Union européenne depuis 1999. Les Quinze accusent Séoul de verser des subventions à ses industriels, notamment à Hyundai, le numéro un mondial.

Pour la petite histoire, le Pdg de la filiale " gros bateaux " du conglomérat n'est autre que le fameux Chung Moon-joon, le fils du fondateur de l'empire Hyundai, le patron du foot en Corée et ex-futur candidat piteux à la présidentielle. C'est dire si le secteur est une affaire d'Etat. L'Europe a porté plainte en octobre dernier auprès de l'OMC, Séoul a de son côté entamé une enquête sur les subventions européennes au mois de janvier. Une réponse du berger à la bergère.

La Corée du Sud ayant misé sur un nombre réduit de secteurs pour tirer vers le haut son produit intérieur brut, les autorités sont prêtes à tout pour les protéger.

Mais le secteur qui est aujourd'hui soumis a de profondes transformations en raison des réformes, c'est l'agriculture. Comme dans tous les pays du monde, ce domaine est très sensible. Là encore l'empoignade oppose les

Asiatiques et les Européens, les premiers accusant les seconds de soutenir leurs agriculteurs à coup de subventions.

En revanche, le gouvernement coréen partage avec Bruxelles la conviction qu'il faut pouvoir protéger certains produits agricoles stratégiques ou certains secteurs vitaux.

La question de l'agriculture a déjà été le point d'achoppement des négociations sur le traité de libre échange avec le Chili, un texte en négociation depuis trois ans mais toujours pas signé pour cause de grogne des paysans coréens.

Dans le cadre de l'OMC, la péninsule doit ouvrir son marché du riz d'ici 2004. Au mois de novembre dernier, 70 000 fermiers s'étaient rassemblés à Séoul devant le Parlement pour protester contre le traité avec le Chili mais aussi contre cet impératif. Ils demandent un moratoire voire une renégociation des accords de l'OMC.

Dans la perspective de cette révolution, l'Etat prépare le terrain et propose des compensations aux exploitants. Il aimerait aussi conserver à l'OMC le statut de pays en voie de développement octroyé à la Corée du Sud et qui lui permet de se protéger contre les importations de produits étrangers. Mais pour sauver les producteurs de riz et laisser une chance aux productions locales il faudrait imposer des tarifs douaniers exorbitants, de l'ordre de 380%, impossible pour un pays de l'OMC.

Le gouvernement espère réduire de 12% la surface consacrée au riz d'ici 2005, il incite à coup de subventions, les agriculteurs à changer de production pour être plus compétitif sur le marché international.

L'agriculture a été le parent pauvre du développement industriel sud-coréen, la main-d'oeuvre, dans ce domaine, a chuté depuis les années 70 passant de 45 à 9%. La plupart des exploitations sont encore familiales donc très peu rentables. Avec le changement des habitudes alimentaires, la consommation intérieure du riz est en chute libre depuis le milieu des années 90. Les cultivateurs se sentent abandonnés par les pouvoirs publics et sacrifiés sur l'autel de la course au PIB. Le coup de poignard dans le dos de l'accord sur l'ail avec la Chine a été l'an dernier un véritable psychodrame.

Décidément, dans le pays champion du monde de l'accès internet les paysans ont bien du mal à trouver leur place.

LIRE aussi: l'article de Yves DE RICAUD , Mission Économique, Séoul

 


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